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Le Premier entretien clinique: le poids des mots devant un enfant.

  • Photo du rédacteur: Aurélie Tohoué
    Aurélie Tohoué
  • 5 août
  • 3 min de lecture

Dernière mise à jour : 6 août

Le poids des mots dans l'entretien clinique


Les mots qu’on dit devant l’enfant : ce qu’ils entendent, ce qu’ils retiennent


Dans ma pratique, je reçois des parents qui viennent chercher de l’aide pour leur enfant.

Un enfant diagnostiqué avec un TDAH, un trouble DYS, un TSA.

Un enfant qui souffre, à l’école, à la maison, dans sa relation aux autres et à lui-même.

Un enfant que ses parents aiment profondément… mais qui traverse un quotidien difficile.

Et à chaque première séance, un point me frappe toujours : le poids des mots utilisés en sa présence.


L’anamnèse : un moment délicat pour l’enfant


Quand on accueille un enfant en difficulté, il est important pour le thérapeute de comprendre l'histoire clinique, développementale, comportementale de l'enfant et pour les parents de vouloir tout raconter.

Raconter les troubles.

Le parcours.

Les rendez-vous. Les crises. Les exclusions. L’épuisement.

Et ils le font souvent avec sincérité, avec émotion, en espérant que le thérapeute comprendra toute la complexité de leur enfant qu'ils veulent aider plus que tout.


Mais ce récit se fait parfois alors que l’enfant est présent, juste à côté.

Et dans ces moments-là, ce que j’observe, c’est un enfant qui baisse les yeux.

Qui se recroqueville un peu.

Qui entend, une fois de plus, son histoire racontée sans lui comme s'il n'était là, comme si tout ce récit n'avait pas d'impact sur lui.


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Ce que l’enfant entend… et ce qu’il comprend


Il entend qu’il est "ingérable", "toujours en crise", "impossible à cadrer", "en échec scolaire", "inadapté socialement", "fatiguant", "épuisant", "insupportable".

Parfois ces mots sont dits très directement.

Parfois ils sont plus subtils, plus nuancés.

Mais l’enfant comprend quand même.

Et ce que ces mots lui renvoient, c’est qu’il est un problème.

Qu’il est "trop". Ou "pas assez".Qu’il dérange. Qu’il ne va pas. Qu’il est une source de souffrance pour ceux qui l’aiment.

Ces enfants, souvent déjà stigmatisés dans leur environnement scolaire ou familial, n’ont pas besoin d’être encore une fois placés dans un rôle passif, réduit à leurs difficultés.


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Choisir nos mots, c’est déjà accompagner


C’est pourquoi, dans mon approche, je mets un point d’honneur à ne jamais relater le passé de l’enfant en sa présence.

L’anamnèse, je la fais bien sûr.


Je recueille l’histoire, les diagnostics, les bilans, les difficultés rencontrées.

Je prends le temps d’écouter les parents, leurs peurs, leurs besoins, leur fatigue, leur engagement.

Mais pas devant l’enfant, je recueille ces informations en amont.

Ce temps lui est réservé autrement. Il a, lui aussi, besoin d’un espace où il peut parler, à sa manière, de ce qu’il vit.

Un espace où il peut être vu autrement que par le prisme de ses troubles.

Un espace où il peut redevenir acteur de sa propre histoire.


Une alliance à trois


Créer une relation thérapeutique de confiance, ce n’est pas uniquement "travailler sur les symptômes".

C’est tisser une alliance avec l’enfant et ses parents.

C’est construire un lien dans lequel chacun se sent respecté, entendu, soutenu.

Car pour que l’accompagnement soit bénéfique, il faut que l’enfant se sente en sécurité.

Et cela commence par ce qu’il entend dès les premières minutes : des mots choisis, bienveillants, justes.


En résumé

🔸 Les enfants entendent tout. Même quand on pense qu’ils ne comprennent pas.

🔸 Les mots que nous utilisons peuvent les blesser… ou les soutenir.

🔸 Raconter l’histoire d’un enfant devant lui, c’est parfois raviver des blessures.

🔸 Offrir un espace d’écoute respectueux, c’est déjà commencer à réparer.


Les mots ne sont jamais neutres.

En consultation, accompagnés de douceur et de bienveillance, ils sont le premier outil thérapeutique.

Et souvent, ce sont eux qui permettent à l’enfant d’oser enfin se dire :"Ici, je peux être moi."



 
 
 
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